Reves-de-Lectures

 
 


 
 
   « D'un blanc cristallin, ce blanc dur et froid, presque bleu, le dragon de glace était couvert de givre ; quand il se déplaçait, sa peau se craquelait telle la croûte de neige sous les bottes d'un marcheur et des paillettes de glace en tombaient. Il avait des yeux clairs, profonds, glacés. Il avait des glaçons pour dents, trois rangées de lances inégales, blanches dans la caverne bleue de sa bouche. S'il battait des ailes, la bise se levait, la neige voltigeait, tourbillonnait, le monde se recroquevillait, frissonnait. S'il ouvrait sa vaste gueule pour souffler, il n'en jaillissait pas le feu à la puanteur sulfureuse des dragons inférieurs. Le dragon de glace soufflait du froid. » 
 
 
 
 
   Devinez pourquoi j'ai choisi ce livre ? Bingo ! Parce que George R.R. Martin l'a écrit (et que c'est beaucoup plus rapide à lire que Le Trône de Fer et ses 1000 pages par tome). Parlons donc tout de suite de lui !
 
   On reconnaît immédiatement que c'est lui qui l'a écrit. Pourquoi ? Mais pour le côté fantasy de l'histoire, qui se passe dans le nord, sous la neige, en grande partie l'hiver, et avec des dragons, bien sûr (ça, mais surtout le côté gore et impitoyable de l'histoire. Sérieusement, c'est un conte destiné aux enfants ??). C'est quasiment désespérant, je crois que l'auteur n'a pas la moindre idée de ce qui peut être légèrement choquant. Parce que, de ce que j'ai compris, c'est une histoire pour enfant (à la base, même si je ne lirais jamais ça à mes enfants avant qu'ils dorment, je ne tiens pas à les traumatiser ou à en faire des bourreaux). Je vous le dis tout de suite, il ne nous épargne rien, d'autant plus que c'est la guerre : on voit donc sans problème défiler des soldats estropiés (ça va de celui qui a les deux yeux crevés à ceux qui ont perdu un membre, voire deux, voire quatre, en passant par les brûlés qui sentent la putréfaction à l'autre bout de la route, et ceux qui meurent et qu'on laisse justement sur le côté de la route. Voilà, bonne nuit et faites de beaux rêves). J'étais loin de m'attendre à ça, mais honnêtement, ça ne m'a pas vraiment surprise (on parle de George R.R. Martin).
 
   A part tuer des gens et en mutiler d'autres, je n'ai pas vu tellement d'intérêt à l'histoire. Ah, je ne vous ai pas dit ! On suit Adara, une enfant de l'hiver (sa mère est morte en la mettant au monde), qui ne ressemble pas aux autres et qui attend avec impatience l'hiver pour voir le dragon de glace (en quelque sorte son pote). Elle est assez sympathique, et le dragon de glace est totalement fascinant. J'aurais aimé en savoir un peu plus sur lui (et sur l'endroit qui est appelé "the land of always-winter", ça semble magique). Il ne se passe pas grand-chose, on voit surtout la succession des hivers, et la fin m'a paru bâclée. C'était vraiment très frustrant !
 
   Passons au gros point fort de ce livre : les illustrations de Luis Royo. Elles sont magnifiques ! D'une seule couleur, un bleu hivernal très approprié, il y en a sur environ la moitié des pages. J'admire les détails que l'illustrateur a faits : la moindre petite branche est dessinée, pareil pour les feuilles quand il y en a (les soldats estropiés aussi, si jamais vous vous posiez la question). Vous allez sûrement passer plus de temps à les observer qu'à lire l'histoire. Je ne sais pas pour la version française, mais sous la jaquette de la version américaine il y a un dragon bleu comme de la glace et brillant sur le livre gris clair, c'est très beau.
 
   La version anglaise ne m'a pas semblé difficile du tout, d'autant plus que le livre fait 120 pages et qu'il y a des illustrations partout. Il faut juste s'habituer au vocabulaire de conte, donc pas très courant aujourd'hui (seldom ou ofttimes, par exemple). Je dois quand même reconnaître que, étant une grande fan de fantasy, le vocabulaire qui va avec ce genre m'est familier et je ne remarque même plus les mots qui en font partie, alors peut-être que certains pourront vous poser problème. Dans tous les cas, si vous êtes un minimum à l'aise en anglais, ça devrait aller, surtout que la minuscule épaisseur du livre est plutôt encourageante.
 
   Je vous conseille ce livre si vous avez envie d'un petit conte sympathique et bien violent pour l'hiver, c'est lu en moins d'une journée, mais ne vous attendez pas à ce que ça ressemble au Trône de Fer (enfin, sauf en ce qui concerne la guerre).

 
 

 
 
   Après une longue journée de réunions, décrets et audiences, le jeune tsar s'endort en attendant sa femme pour le réveillon. Lorsqu'il rouvre les yeux, il n'est plus dans son palais mais à la frontière avec la Prusse et voit un soldat tirer sur un contrebandier. Toute la nuit, il voyage ainsi à travers la Russie et prend peu à peu conscience du poids des responsabilités qui lui incombent... 
 
 
 
 
   Pour ceux qui ne le savent pas, j'adore la Russie et sa culture, ça me passionne depuis très longtemps ! J'avais vraiment très envie de lire les grands auteurs russes, mais j'avais un peu peur d'être déçue, surtout en voyant l'épaisseur de leurs livres. Alors quand je suis tombée par hasard sur ce tout petit livre de 83 pages, je me suis dit que c'était l'occasion parfaite pour découvrir ! (D'ailleurs, cette chronique reprend la série d'avant les vacances : je posterai la chronique d'un classique tous les mercredis jusqu'à ce que j'aie rattrapé mon retard)
 
   Il y a quatre nouvelles dans ce livre : Les mémoires d'un fou, Une âme simple, Le réveillon du jeune tsar, et Ainsi meurt l'amour. Elles sont toutes relativement tristes. En tout cas pas très joyeuses. Voire même complètement déprimantes. Mais elles ont toutes un point commun : elles sont incroyablement justes ! Elles font réfléchir et nous mettent des vérités sous les yeux. Ça m'a fait sourire de voir des réflexions dont on a parlé en philo, et je me suis demandé si mon prof avait lu ce livre. La première est sûrement la plus philosophique, elle nous pousse à nous interroger sur pleins de choses à travers la peur : la peur face à la mort, la peur face à la vie, face à la peur elle-même... J'ai été étonnée de voir que je m'étais souvent posé les mêmes questions que le personnage qu'on suit. La deuxième nouvelle est très émouvante, on y suit Aliocha, un jeune homme qui fait tout ce qu'on lui demande sans jamais se plaindre. C'est horrible de voir comment il se fait exploiter par tout le monde, sans que personne se préoccupe de lui ! Je ne vous parle pas des deux dernières, parce que je les ai un peu moins aimées, et comme elles sont plus courtes il n'y a pas vraiment beaucoup à dire dessus.
 
   Un petit mot rapide sur l'auteur : j'adore son écriture ! Pour son époque, ça change énormément des auteurs français et de leurs romans réalistes. L'écriture elle-même est intéressante, on ne se rend même pas compte qu'on est en train de lire ! Moi qui lis très lentement, j'ai fini ce livre en moins de deux heures (un vrai miracle), parce que l'écriture est tellement fluide qu'on lit très rapidement, et on arrive à la fin du livre en se disant « déjà ? ».
 
   J'ai beaucoup aimé ce petit recueil de nouvelles, qui sont toutes très intéressantes ! Ça me donne envie de lire d'autres œuvres de Tolstoï, alors il va falloir que je trouve Anna Karénine bientôt ! Je vous conseille ces nouvelles pour découvrir, ou juste pour une lecture rapide, elles sont vraiment très agréables quand on est au chaud sous une couverture !